La culture dans le secteur financier – Philanthropie et subsidiarité

La peur a toujours été particulièrement fédératrice et vecteur de transformation, notamment dans l’atteinte de résultats dans le « temps court ». Cette approche pourrait rencontrer ses limites, d’autant plus dans une société, en quête de sens. L’essentialité d’une entreprise dans le « temps long », son caractère philanthropique, ne deviendraient-ils pas un levier de transformation plus engageant pour les clients et les collaborateurs ?

Après la peur ou les risques, le temps de la philanthropie, comme levier de transformation ?

La plupart des décisions sont prises pour réagir à un danger, plus ou moins immédiat. Ces décisions sont fortement mobilisatrices, tout le monde prenant conscience de la nécessité à se transformer. Les projets d’efficacité opérationnelle sont les leviers privilégiés, leurs résultats pouvant se mesurer dans le temps court. Changer un modèle, inventer de nouvelles offres, sont plus aléatoires en matière d’impacts financiers. Face à l’industrialisation de la fabrication des ordinateurs, Lou Gerstner n’a eu aucun problème pour transformer radicalement la société IBM d’un fabricant d’ordinateurs en une entreprise de services. De nos jours, la peur reste toujours un levier très efficace, pour autant très peu partagé par les salariés d’une entreprise du secteur financier, dont les résultats financiers sont tels, que même le paiement d’amendes record ne les fait faillir. « Too big to fail ! » ou plutôt « Still too lucrative to change ! »

Alors, comment faire prendre conscience de la nécessité à se transformer ? L’inverse de la peur est la philanthropie. Une entreprise du secteur financier qui saura proposer une vision aux impacts positifs sur la société, sur l’humanité, n’aura aucun souci à mobiliser un corps social en quête de sens. Les banques et les assurances ont, par nature, le positionnement d’être au cœur de l’économie, d’être les garants des équilibres sociaux, voire de la démocratie. Eduquer les citoyens sur leur engagement, redonner de la fierté aux collaborateurs de l’enjeu de la finance, développer des nouveaux services inclusifs, sont autant de leviers constitutifs d’une vision engageante, qui saura créer l’adhésion et l’envie. L’ouverture sur l’écosystème de l’entreprise, la prise en compte dans la stratégie des impacts sur l’environnement, le social, autant d’essentialités de l’entreprise, ne peuvent que donner du sens aux salariés d’une entreprise, développer la marque vis-à-vis des clients, tout comme la marque employeur. Enfin, une telle vision s’inscrira dans une approche plus proactive de la transformation et moins en réaction à des événements extérieurs. Une vision, ce n’est pas de la stratégie qui doit s’adapter à un environnement fluctuant. La vision reste une ambition, une « inaccessible étoile ».

Savoir déléguer au bon niveau !

C’est ce que l’on appelle le principe de subsidiarité. Savoir déléguer, c’est aussi savoir définir les « interdits », les zones indiscutables, qui traduisent le fait d’appartenir à un groupe, qui a ses propres règles. Bien souvent, l’exercice qui consiste à décrire les zones immuables est une découverte pour les collaborateurs de l’entreprise, découvrant alors qu’ils ont plus de marge de manœuvre qu’ils ne pensaient. Les entreprises pratiquent le principe de la sédimentation, empilant au fur à mesure des règles, des principes, qui deviennent lois ! Redéfinir les marges de liberté favorise donc l’autonomie par la prise de conscience des collaborateurs et de leurs couches managériales. La vision alors se décline en grands objectifs. Le management, inspiré par cette vision et donc les grands objectifs, peut alors faire preuve d’initiatives. 

Cette approche de la délégation vient contrebalancer un modèle jacobiniste, où le dirigeant décide et le manager opérationnel applique, par un modèle plus bottom-up, basé sur le principe de responsabilité individuelle au profit d’un collectif engageant. L’autonomie ne peut se faire sans développer une fierté d’appartenance à une entreprise et de l’utilité à contribuer à de hautes missions dans la société, pour l’humanité. Human Ahead, indéniablement. 

Philippe Auther

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