La “banque des startups” à deux doigts de causer une crise financière

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Banque centrale au cœur de l’écosystème startup américain, la Silicon Valley Bank a connu les affres d’un naufrage éclair rattrapé par un sauvetage miraculeux, en moins d’une semaine.

En janvier 2023, Greg Becker, CEO de la banque, se déclarait “optimiste” pour l’année à venir. Deux mois plus tard, la catastrophe a été évité de justesse.

Lancée en 1983 par un professeur de la prestigieuse université californienne de Stanford dont les étudiants cherchaient des financements pour leurs futurs activités, elle était côtée en bourse et comptait en début d’année plus de 35 000 clients et 175 milliards de dépôts, ce qui en faisait la 16ème banque des Etats-Unis.

“La SVB était devenue une institution incontournable pour les entreprises innovantes en raison de sa connaissance approfondie des marchés de la tech et du capital risque”, explique Ludovic Mounoussamy, fondateur de CAP STRATEGY Consulting. Lorsqu’une start-up se lançait aux Etats-Unis, c’était avec SVB. Elle a financé des entreprises de la Silicon Valley comme Shopify, Airbnb, Uber ou LinkedIn, mais aussi des gros clients du monde financier comme le fonds Andreesen Horowitz.

Implantée à Londres depuis 18 ans et à Tel Aviv depuis 14, elle était également un acteur majeur du financement des startups britanniques et israéliennes.

Un scénario éclair

Mercredi 8 mars, SVB annonce une augmentation de capital de 2,3 milliards de dollars pour doper ses liquidités. “La consommation de trésorerie des clients est restée élevée et s’est encore accrue en février, ce qui s’est traduit par des dépôts inférieurs aux prévisions”, explique Becker. “Nous nous attendons à des taux d’intérêt toujours plus élevés, à des marchés publics et privés sous pression et à des niveaux élevés de consommation de trésorerie de la part de nos clients”. 48 heures plus tard pourtant, c’est le chaos.

Cette décision a suscité des craintes a priori non justifées sur la situation financière de la banque, faisant chuter son action de 60% à Wall Street. Plusieurs grands fonds de capital risque recommandent aux start-ups de transférer leur argent le plus rapidement. 42 milliards plus tard (en seulement quelques heures), la situation devient intenable.

Jeudi soir, les 4 plus grandes banques américaines (JPMorgan-Chase, Bank of America, Citigroup et Wells Fargo) perdent près de 52 milliards de valeur marché, signe de la catastrophe qui semble accourir. Vendredi, les autorités américaines entrent dans la danse alors que les clients cherchent les solutions pour récupérer leur argent, car les garanties offertes se limitent à 250 000 dollars.

Il faudra attendre le weekend pour entrevoir une solution. Les autorités américaines volent au secours avec une série de mesures pour rassurer particuliers et entreprises. SVB annonce dans la nuit de dimanche à lundi que l’ensemble des dépôts sera désormais garanti, et plus seulement 250 000 dollars. Ouf. Dans le même temps, HSBC rachète la branche Britannique du groupe pour une livre, permettant à l’écosystème britannique déjà vacillant de respirer, un peu.

Retour de bâton de la hausse des taux d’intérêt

Pour l’économiste Charles Read, chercheur à Cambridge spécialisé dans les faillites bancaires, cette semaine folle suit un pattern étudié lié à la hausse rapide des taux d’intérêts. “La banque centrale réagit à une poussée de l’inflation, une guerre ou un marché du travail tendu. Des taux plus élevés resserrent les conditions de crédit, les institutions ont donc plus de mal à se financer et la valeur de leurs prêts et leurs actifs s’en ressent”. Au cours des douze derniers mois, la Fed a relevé ses taux de 0,25 % à 0,5 % à 4,5 % à 4,75 %.

“Pendant la pandémie, les jeunes entreprises disposant de liquidités dans un monde d’argent facile ont placé leurs dépôts auprès de la SVB. La demande de prêts étant faible, elle a investi la majeure partie de l’argent dans des obligations à long terme, principalement des titres adossés à des créances hypothécaires et des bons du Trésor américain”. En bref, la SVB prenait des fonds sous forme de dépôts à court terme et les investissait dans des placements à long terme. “Au cours des derniers mois, les taux d’intérêt ont augmenté plus rapidement que les rendements des obligations à long terme, car les taux d’intérêt se sont envolés sous l’impulsion de la Fed.”

Les financements plus difficiles à trouver, les entreprises ont commencé à vouloir dépenser leurs dépôts. Dans le même temps, la hausse des taux a entraîné une baisse des prix des obligations dans laquelle la SVB investissait. Elle a du en vendre certaines à pertes pour financer les retraits, ce qui a incité les déposants à retirer encore plus. “La spirale s’est enclenchée”, conclut-il.

Un avertissement plus qu’une catastrophe

Le ministre de l’Economie Bruno Le Maire s’est voulu rassurant : “Je ne vois pas de risque de contagion, donc il n’y a pas d’alerte spécifique”. Contrairement à la SVB, “les banques françaises ne sont pas exposées à un seul secteur d’activité”. Un point sur lequel s’accorde Charlie Read : “SVB n’est pas un acteur majeur du système financier, elle est presque unique dans le secteur bancaire mondial en termes de dépendance à l’égard d’un seul secteur pour sa clientèle”.

Un positionnement rassurant qui s’accompagne d’une mise en garde, alors que la BCE s’apprête à rehausser une nouvelle fois les taux d’intérêt en mars, pour lutter contre l’inflation : “Si la SVB ne déclenche pas une crise financière de plus grande ampleur, elle devrait servir d’avertissement. La hausse rapide des taux d’intérêt au cours des dernières années a fragilisé l’économie mondiale”. Pas de scénario catastrophe, donc, mais peut être faudrait-il prêter attention aux cris du canari dans la mine.

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