Finance à Impact, Finance Verte : décryptage avec Fanny Picard (Alter Equity)

Léo Marchandon
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Dans l’univers émergent de la finance durable, Fanny Picard, fondatrice d’Alter Equity, éclaire les enjeux sociétaux et environnementaux cruciaux.

L’impact de la Finance sur notre monde en mutation suscite des interrogations et des espoirs. Fanny Picard, à la tête d’Alter Equity, un fonds d’investissement axé sur l’impact sociétal et environnemental, apporte une perspective éclairante sur ces notions. Elle clarifie avec précision les différences entre la finance à impact et la finance verte et souligne l’importance cruciale des startups contribuant à la société de manière positive. Cette vision dépasse le simple aspect environnemental pour englober également les dimensions sociales et managériales des entreprises soutenues. Dans un monde où les enjeux sociaux et environnementaux prennent une place de plus en plus prépondérante, comprendre les critères de sélection de ces startups à impact devient essentiel pour dessiner un avenir financier responsable.

Finance Mag : Finance à impact, finance durable. Qu’est-ce qui se cache précisément derrière ces notions ?

Fanny Picard : Pour moi, la finance à impact est une finance qui soutient les entreprises qui sont elles-mêmes à impact, c’est à dire qui contribuent à la société d’une façon positive en permettant la transition vers une société beaucoup plus durable d’un point de vue environnemental, et beaucoup plus inclusive et heureuse d’un point de vue social. Chez Alter Equity, le fonds d’investissement que j’ai créé, nous considérons que cet impact positif doit se vérifier à un double niveau : l’activité de l’entreprise, qui doit être utile aux personnes ou à l’environnement et une dimension qui concerne ses pratiques de gestion qui doivent être responsables.

Le terme de finance durable est plutôt utilisé aujourd’hui comme synonyme de “finance verte”, soutenant des solutions aux enjeux environnementaux et notamment au dérèglement climatique. Aussi étrange que cela soit pour les connaisseurs du concept de Développement durable, son acception est donc plus étroite que celle de la finance à impact positif, au sein de laquelle la dimension sociale est également importante.

FM : Quels critères utilisez vous pour dénicher les startups à impact ?

F.P : Le premier critère est que leur activité soit utile à la société. Pour ce qui concerne l’impact positif sur les personnes, nous nous intéressons à des secteurs comme l’éducation, la santé, le bien être, le service aux personnes fragiles, l’intégration dans la société et dans l’emploi. Et nous considérons que les entreprises à impact positif sur l’environnement sont celles apportant des solutions aux grands enjeux associés : le climat, la biodiversité et les autres ressources, non vivantes.

Deuxième niveau : nous exigeons de la startup qu’elle s’engage dans une dynamique de progrès vers plus de responsabilité sociale et environnementale dans ses comportements, ses pratiques de gestion. Nous lui demandons d’adopter un plan d’action de 10 à 15 critères sur lesquels elle va progresser pendant que nous sommes présents à son capital. Il s’agit par exemple de diminuer ses émissions de gaz à effets de serre, recycler et diminuer ses consommations, former ses salariés, agir pour l’égalité des chances, ou partager la valeur avec ses salariés.

Enfin, nous vérifions le potentiel de croissance rentable de l’entreprise, nous permettant de rémunérer le risque que prennent nos souscripteurs. Sur cette dimension financière, nous faisons le même métier que les autres fonds. En matière d’impact, notre approche qui a été pionnière continue de se différencier par son avance. Sur les deux dimensions, impact et rentabilité, nous sommes particulièrement rigoureux.

FM : Quel est l’état de la finance à impact aujourd’hui ? Et demain ?

F.P : Il est globalement considéré que la finance à impact représente 1% des actifs sous gestion. Elle est portée par deux forts éléments sous-jacents. En premier lieu, une question morale. Face à la gravité des dérèglements environnementaux et de la souffrance sociale, qui porte au pouvoir des populistes dans un nombre toujours plus important de pays, notre génération porte une responsabilité inédite. Après nous il sera trop tard, il nous revient de changer de modèle pour maintenir des conditions soutenables de vie sur terre.

D’un point de vue business, à un moment où la croissance globale diminue, notamment du fait de la hausse des taux d’intérêt, les sujets liés au développement durable font partie des rares connaissant une forte croissance. Il y a donc un intérêt financier évident à investir dans ces domaines, parce que ça fait partie des rares qui vont continuer de générer un rendement dynamique. Vous aurez compris ma conviction qu’il s’agit d’un segment de marché à privilégier dans une gestion d’actifs !

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