Marc Lanvin (Banque Casino) et Christophe Chamberland (Fnac Darty) : le rôle des Grandes Enseignes dans la Fintech

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L’objectif des Fintech est en grande partie d’offrir des services bancaires, financiers ou d’assurance plus rapides, entièrement en ligne, avec une expérience client très intuitive. En contrepartie, on pointe souvent du doigt chez les fintech leurs bases clients et données référencées, forcément moins importantes que celles des grands acteurs de la finance.
Les grandes enseignes de distribution sont, à l’instar de ces grands acteurs financiers, en possession des mêmes atouts données et clientèle. Elles sont rentrées sur le marché de la finance et ont diversifié il y a déjà longtemps leurs services via des offres bancaires, assurance, prêts, etc. (par exemple, Leclerc et la Banque Edel en 1991 ou Carrefour Banque en 1980).
Dans le contexte actuel (celui de la montée en puissance des fintech et des grands plans de transformation des banques et assurances), quel est le rôle et la valeur ajoutée des offres bancaires des Grandes Enseignes ? Comment travaillent-elles avec les Fintech ? Et qu’a t-on à apprendre de ces géants du commerce ?
Nous avons rencontré :
Marc Lanvin, Directeur Général Adjoint de la Banque Casino et anciennement créateur de la Banque Directe,
et
Christophe Chamberland, Directeur des Services Marchands du Groupe Fnac Darty et responsable des pôles Produits financiers, Assurances et extensions de garanties et Abonnements.
Ils nous racontent comment ils perçoivent leur rôle et position au sein de l’écosystème Fintech.

Marc Lanvin, quelle est l’actualité récente de Banque Casino ?

@Marc Lanvin (Banque Casino)
Nous travaillons en ce moment sur une nouvelle campagne d’assurance scolaire pour 2018-2019. Nous venons également de lancer mi-juin avec CDiscount une assurance emprunteur individuelle sur les crédits immobiliers. Et nous avons mis en place il y a quelques mois une offre de crédit instantané 100% digitale, qui s’appelle “Coup de pouce” en partenariat avec CDiscount, étendu ensuite chez Casino, et depuis mi-juin chez Franprix.

En tant que néobanque des consommateurs, nous avons à cœur de mettre en œuvre des solutions toujours plus adaptées aux demandes des clients afin de faciliter leurs paiements.

D’un point de vue BtoB, la liste de nos partenariats CB4X – solution de paiement fractionné – est également en constante évolution. Nous avons dernièrement lancé CB4X dans le secteur de la bijouterie, de la mode mais également pour d’importants acteurs du voyage, renforçant ainsi notre position de leader dans ce domaine d’activité.

Et nous sommes également très fiers d’avoir récemment franchi le cap des 2 millions de clients !

Christophe Chamberland, quel est votre travail au quotidien chez Fnac Darty ?

@Christophe Chamberland (Fnac Darty)
Je dirige trois pôles, chacun pilotant les offres des deux enseignes de notre groupe, Fnac et Darty :
Le pôle Services financiers réunit les offres de financement et de crédit notamment via nos deux cartes Fnac Mastercard et Visa Darty. Nous proposons aussi à nos clients étrangers un service de détaxe avec notre partenaire Premier Tax Free. Les offres de reprises multimédia mais aussi la location, qui correspond à un nouveau mode de consommation sur lequel nous travaillons activement, sont dans ce périmètre.
Un second pôle Assurances rassemble les offres d’assurances mobiles et nomades et les extensions de garantie qui couvrent tous les produits susceptibles d’être garantis sur une durée de cinq ans, afin d’allonger la garantie légale de deux ans.
Enfin, le pôle Abonnements regroupe les abonnements tiers (Bouygues, SFR, Engie, Direct Energie, Sowee, Canal plus etc.) et les abonnements en propre (comme les packs anti-virus associés à la vente d’un PC par exemple).

Marc Lanvin, pourquoi Banque Casino a t’elle choisi de lancer une offre d’assurance emprunteur, en partenariat avec une marketplace (CDiscount)?

@Marc Lanvin
Tout d’abord, le domaine du crédit est pratiqué depuis longtemps chez Banque Casino.
Dans l’ADN de CDiscount, on retrouve l’objectif de proposer à une clientèle extrêmement large des tarifs négociés au plus bas, en étant disruptif. L’assurance emprunteur nous semblait entrer complètement dans cette démarche-là. Notre analyse était qu’il y avait déjà du monde qui s’intéressait à ce marché, mais il s’agissait plutôt de mutuelles, d’assureurs et il n’y avait pas d’acteur majeur du web qui s’intéressait à ces sujets-là. Nous nous sommes engouffrés dans cette brèche.
La part du crédit immobilier est significative dans le budget des ménages mais on savait qu’il n’y avait rien à faire sur le crédit immobilier lui-même parce qu’aujourd’hui il est impossible de pratiquer des taux plus bas que ceux sur le marché.
En revanche, il y avait une marge de négociation sur l’assurance individuelle. On s’est donc attachés à avoir une offre 100% digitale avec des tarifs extrêmements concurrentiels pour les 20 millions de visiteurs uniques du site CDiscount.

Cela fait plus d’un an que la Fnac Mastercard a été lancée, quel premier bilan pouvez-vous en faire ?

@Christophe Chamberland
Nous proposions auparavant une carte privative, utilisable uniquement dans l’enseigne Fnac. La Fnac Mastercard a été lancée au moment du rapprochement entre Fnac et Darty.
Darty était déjà doté d’une carte universelle de paiement, la Visa Darty, qui a été très bien accueillie. Nous sommes parvenus à reproduire ce succès avec la Fnac Mastercard.
Cette carte de paiement est entièrement gratuite et permet de cumuler des avantages  (1% de toutes les dépenses sont transformées en points fidélités crédités sur le compte Fnac du client adhérent). L’accueil de nos adhérents a été très positif et nous sommes dans une dynamique de croissance élevée. Deux types de profils de clients souscrivent à l’offre Fnac Mastercard :
– Nos adhérents, qui vont prendre l’option Mastercard pour cagnotter encore plus de points.
– Des clients qui souscrivent la Mastercard lors d’un achat qu’ils souhaitent régler en plusieurs fois.

L’offre de Banque Casino regroupe des offres de crédits, prêts, cartes bancaires et assurances. Certaines fintech vous donnent de l’inspiration pour créer vos offres ? Travaillez-vous avec certaines d’entre elles ?

@Marc Lanvin
On fait évidemment, une veille du marché de la Fintech. Celles que nous évoquons le plus souvent entre nous sont Révolut et N26. On aime bien leur parcours client que l’on trouve similaire au nôtre.
Nous nous voyons comme une Fintech chez Banque Casino. On a énormément travaillé les parcours digitaux et la souscription digitale. Globalement, toutes les Fintech travaillent sur ce même modèle, on se regarde, on les regarde, on se compare, on chronomètre.
Nous travaillons principalement pour notre propre compte mais nous avons été abordés par ces nouveaux acteurs qui n’ont pas ces solutions de paiement facilité.  Chez Banque Casino, nous avons les bonnes API pour leur proposer des solutions de paiement. Nous avons des discussions très avancées avec des acteurs réputés du marché en national et à l’international.

Christophe Chamberland, les problématiques de fidélité, de paiement, de prêt, de garantie produits sont très présentes dans un Groupe comme Fnac Darty. Travaillez-vous avec des startup Fintech sur ces sujets ?

@Christophe Chamberland
Je pourrai vous faire la même réponse que Marc, à la différence que nous sommes distributeurs. C’est vraiment le paiement qui est au sein de la réflexion du Groupe. Notre direction innovation, a notamment pour mission d’identifier les pépites, startups et autres acteurs des fintech susceptible de nous accompagner.
Nous sommes par exemple actuellement en discussion avec une fintech dans les solutions de prélèvement récurrent. On travaille avec des ex-Fintech comme Ogone aujourd’hui devenu Ingenico, ou encore Lemonetik.
Nous menons en permanence une veille Fintech autour du paiement, de l’assurance, de la digitalisation, de l’abonnement, de la fidélité dans le but principal d’optimiser l’expérience et le parcours client.
Nous ne sommes pas banquier mais distributeur. Nous nouons donc des partenariats pour distribuer nos offres de financement. Pour le crédit, nous travaillons avec Crédit Agricole Consumer Finance pour nos deux enseignes. Nous avons créé une Joint venture côté Darty, et côté Fnac, nous sommes sur un accord commercial plus classique.
Au sein de leur pôle Développement, ils innovent en permanence en proposant des évolutions et des nouvelles prestations liées aux moyens de paiement que l’on regarde de très près, que nous challengeons et que, parfois même, nous pilotons conjointement. C’est presque le schéma de la startup dans la grande entreprise.
Nous avons une double manière de travailler : d’un côté, nous nous  appuyons sur des partenaires très installés, qui développent des solutions qui peuvent nous être utiles et de l’autre, notre cellule Innovation rencontre des acteurs de la fintech encore plus agiles, et avec qui nous pourrions être amenés à collaborer.

On a l’impression que la Banque Casino et la Fnac proposent l’offre idéale, située entre celle des acteurs traditionnels de la banque (des processus plus lourds, un attachement à la marque de moins en moins visible) et celle des fintech (une base clients plus engagée mais moins forte) : quel est votre sentiment sur ce positionnement ?

@Marc Lanvin
J’ai le sentiment que nous sommes dans la position idéale : on a la bonne taille pour être agile constamment, c’est-à-dire ne pas avoir à rattraper un retard sur la digitalisation et être toujours en croissance. Nous n’avons pas d’agences physiques donc nous n’avons pas besoin d’être très nombreux (200 collaborateurs à ce jour).
Nous avons une ancienneté (création en 2001) et une taille de travail installée qui nous permettent d’expérimenter nos parcours, de les alimenter en permanence avec du volume et de les améliorer, non pas avec du rêve, mais avec des vrais cas clients.
Nous avons la double contrainte de satisfaire le client final (le consommateur, l’internaute, etc.) et nos partenaires.
Nos partenaires sont très exigeants : ce sont des entreprises comme La Fnac sauf que dans notre cas notre partenaire s’appelle CDiscount. Ces partenaires sont actionnaires donc quand on a un client qui vient se plaindre dans l’espace client CDiscount ou dans l’espace service d’un Géant Casino, ça nous remonte très vite.
Cela fait plusieurs années que nous avons étayé nos offres au-delà de Géant Casino, en proposant par exemple des offres de paiement pour les e-commerçants, qui sont, à juste titre, obsédés par leur transformation. Si nous faisons mal notre job, nous leur faisons perdre du business : ça nous donne un niveau d’exigence et un niveau d’actualité. D’un autre côté, on est forcément interrogés par tous les acteurs startups qui sont en train de lancer les nouveaux business. Nous ne sommes pas en train de lancer les services financiers de 2025, nous sommes en train de faire ceux de 2019 ; c’est pour cela que je dis que l’on est dans un scénario un peu idéal.

Si nous faisons mal notre job, nous leur faisons perdre du business. […] Nous ne sommes pas en train de lancer les services financiers de 2025, nous sommes en train de faire ceux de 2019.” Marc Lanvin (Banque Casino)

@Christophe Chamberland
Oui, je partage le même sentiment, avec ma casquette retail complémentaire. On rencontre cette même problématique qui nécessite de s’adapter en permanence aux nouveaux besoins et aux nouveaux usages de nos clients. Le but du jeu, c’est de toujours leur proposer la meilleure solution. Ce qui est confortable au sein de la Direction des Services et avec la Direction de l’Innovation, c’est que l’on a la liberté d’innover au sein d’un grand Groupe. C’est plutôt intéressant. On reçoit les demandes de nos clients en temps réel au quotidien : on recueille en permanence leurs attentes et leurs besoins et on s’adapte pour être en capacité d’y répondre au mieux.
Il existe évidemment de grandes disparités entre le financement d’une banque et d’un retailer : par exemple, si vous avez besoin de vous acheter un lave-linge, vous avez besoin de six cents euros. Pas de dix milles euros. Négocier un prêt auprès de votre banque va être lourd et compliqué, cela va certainement prendre plus de dix minutes ou d’un quart d’heure, comme cela est le cas lors d’un simple passage en magasin.
Ce que Fnac Darty doit apporter à ses clients, ce sont des solutions pour leur permettre de répondre à leurs besoins tout en respectant certaines règles  (de non-endettement, etc.) et de sécuriser au maximum leurs actes d’achat, avec une expérience la plus souple possible. On s’attache à répondre aux besoins du client en magasin.
Accompagner le client sur la chaîne complète d’achat, c’est lui proposer tout ce dont il a besoin, mais sans aller plus loin ; s’il a besoin d’assurer ses produits, nous pouvons lui proposer une assurance adaptée au produit qu’il vient d’acquérir et à l’usage qu’il va en faire; s’il a besoin d’un abonnement internet pour utiliser le PC qu’il vient d’acheter, on doit pouvoir lui proposer la meilleure offre etc. L’idée est vraiment de permettre au client de bénéficier d’un écosystème produit-services complet, dans lequel il va puiser selon ses besoins, et dont les produits financiers font partie.
On propose des prestations complémentaires à celles des banques avec plus de souplesse je pense. Evidemment, si le client a besoin d’un prêt immobilier pour acheter une maison, je ne saurai pas y répondre ! Moi, je lui donne simplement les moyens d’équiper cette maison.
La Société Générale explique dans un article du JDN que l’entreprise “complète son catalogue API à destination d’acteurs tiers” (depuis 2014 à usage interne et depuis 2017 à usage externe) et qu’ils appliquent “la même logique que la Fnac et qu’Amazon”.
Sur quels modèles et quels usages pensez-vous que les banques, voire les Fintech, ont à apprendre d’acteurs du retail ?
@Christophe Chamberland 
Dans le retail, nous travaillons toujours avec souplesse et réactivité. Cela est lié à notre capacité à nous entourer des bons partenaires et des bonnes personnes quand il le faut. Nous n’avons pas vocation à tout développer nous-mêmes : nous aimons travailler avec d’autres acteurs afin d’intégrer les bonnes idées, toujours dans la logique de satisfaire notre client, et ce toujours plus rapidement. C’est en lui donnant immédiatement satisfaction que nous allons le fidéliser et que nous pérennisons notre activité.
Notre objectif premier n’est pas systématiquement un Return On Investment et de gagner de l’argent dans l’immédiat mais c’est de donner au client des raisons d’apprécier notre enseigne et lui donner envie de revenir  régulièrement. Cela va effectivement générer un gain additionnel, dans la vente d’assurance par exemple, mais c’est avant tout pour être au service du client que nous nous devons de lui proposer cette offre. Si je laisse partir un client avec un smartphone a 1200€, sans lui proposer une aide pour le financer ou de l’assurer contre le vol, je n’ai pas fait mon job. Et à la fin, c’est toujours le client qui choisit.
@Marc Lanvin
Je suis totalement aligné avec Christophe et je rajouterai un autre angle. Quand on travaille très près du retail et de l’acte d’achat, le côté pragmatique est important. On n’est pas des “théoriciens” du crédit et du paiement, on est dans le concret : notre obsession est que le passage en caisse se fasse le plus vite possible. Dans la banque traditionnelle, l’unité de temps c’est l’année, voire des plans triennaux. Dans la grande distribution, l’unité de temps c’est la semaine : il faut savoir s’adapter rapidement et être pragmatique.
Quant à la Banque Casino, nous avons travaillé nos premières offres de paiement fractionnées, le sujet n’était pas de trouver le client qui va pouvoir payer.  
Un avocat ou un médecin n’aura pas forcément besoin de payer en quatre fois. Notre métier est de proposer du paiement en quatre fois à des gens qui auraient eu du mal à se payer leur voyage en une fois. En bref, chercher la bonne offre pour la bonne personne.
Pour reprendre cette idée forte du pragmatisme, on ne propose pas du paiement fractionné sur un voyage de la même façon que l’on fait du paiement fractionné sur les pneus. On est obligé de s’adapter aux métiers de nos partenaires professionnels à qui l’on propose l’offre de paiement fractionné pour leurs clients. Il y a des clients qui achètent leurs pneus à crédit et pas leur voyage, et réciproquement. C’est la différence que l’on peut avoir vis-à-vis d’une banque classique : c’est notre façon de s’adapter à la réalité et au rythme. On se rend compte très vite si l’acte d’achat a fonctionné, on a un feedback quasi immédiat.
@Christophe Chamberland
Il est important de rappeler que tous les acteurs retailer s’appuient évidemment aujourd’hui sur des acteurs bancaires, nous-même avons ici fait l’exercice de nous comparer avec les banques, ce sont bien avec ces mêmes banques que nous travaillons. Les maisons-mères ont toutes créé des filiales ou des structures dédiées, pour répondre à nos attentes et notamment à la contrainte de réactivité  liée au métier de retailer. Dans les exemples évoqués au cours de cet entretien, nous avons émis des comparaisons par rapport aux banques traditionnelles mais ce ne sont pas forcément avec ces acteurs-là que l’on travaille. Nous travaillons avec des structures qui sont des filiales ou des annexes de ces banques et qui sont conçues pour répondre à nos contraintes. Il y a encore parfois un hiatus entre nos attentes et les moyens qu’ils mettent en place, mais nous retranscrivons des exigences qui sont celles des clients. Comme le disait Marc, ça se joue à la semaine, à la minute ou à la seconde près. C’est parfois un peu complexe mais on a noté un très net progrès de part et d’autre ces dernières années.
Aujourd’hui les acteurs startups, fintech et les filiales des grands groupe bancaires font collectivement progresser la qualité de la relation client à travers des services financiers innovants et adaptés.

” Nous retranscrivons des exigences qui sont celles des clients. […] ça se joue à la semaine, à la minute ou à la seconde près. C’est parfois un peu complexe mais on a noté un très net progrès.” Christophe Chamberland (Fnac Darty)

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