Maud Charaf, HUB612 : « Les entreprises doivent gagner du cash »

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De retour du Web Summit 2022 de Lisbonne, la directrice adjointe de HUB612, Maud Charaf, constate que la période est en train de changer. Finis les gadgets technologiques. Les investisseurs se (re)concentrent sur les projets à rentabilité rapide, avec de vrais produits à vendre qui répondent à une problématique réelle du client. 

Maud Charaf est directrice adjointe de HUB612, incubateur et accélérateur d’entreprises fintech et insurtech, voulu par la Caisse d’Epargne en région Rhone-Alpes. Depuis six ans, plus de 50 entreprises ont été hébergées et accompagnées par HUB612 qui investit aussi dans une demi-douzaine de projets chaque année. 

Vous rentrez du Web Summit 2022 de Lisbonne ; quelle est l’ambiance qui domine dans la tech et plus particulièrement dans la Fintech ? 

Une évolution qu’on commençait à percevoir depuis le mois de juin, autour d’un mouvement « winter is coming » se confirme clairement. Les fonds d’investissement regardent désormais les projets qui ne vont plus seulement vers la rentabilité mais qui vont vers la rapidité de la rentabilité. L’ère du PowerPoint cède la place aux tableaux Excel. Autrement dit, c’en est fini de la belle présentation marketing sans projet réel. Ce sont maintenant les indicateurs comptables qui sont regardés à la loupe et la création de valeur.


Soigner sa marge plutôt que courir après la croissance

Et ce n’est pas plus mal. Le projet qui sort du lot est celui qui répond à un vrai besoin client. La période du jeune entrepreneur qui pense que c’est facile de monter une boite plutôt que de chercher un poste de salarié va venir percuter le moment où seules les entreprises qui répondent à une vraie problématique pour avoir des clients ont de l’avenir. Epuration, maturation, rationalisation, on appelle ça comme on veut, mais on revient aux fondamentaux : les entreprises doivent apprendre à gagner du cash.

C’est la fin des levées de fonds en cascade comme source de revenus ?   

Seules les entreprises qui ont une vraie promesse de marché vont réussir à lever des fonds. La question c’est : est-ce qu’on court après la croissance ou après la marge ? La réponse est maintenant validée : il vaut mieux soigner sa marge. On en parle depuis juillet, les fonds ont commencé à se réorienter en septembre. Le Web Summit est venu confirmer cette orientation voilà quelques jours. Les levées de fonds en seed trouveront moins d’écho et la levée de fonds à plusieurs millions d’euros doit vraiment être lisible comme un accélérateur de business, non plus comme un complément de trésorerie. 

L’élaboration d’une réglementation de plus en plus précise sur le secteur ne vient-elle pas aussi modifier la donne ? 

Sous l’angle Fintech, on sent le poids de la réglementation en France et en Europe qui n’évolue pas aussi vite que la technologie. Les entreprises doivent donc trouver le moyen de dialoguer avec cette réglementation pour protéger les clients à qui elles proposent des services. Charles McManus, le CEO de ClearBank, a bien expliqué à Lisbonne que la régulation lui a été imposée à cause d’une minorité de gens qui se comportaient mal, mais qu’au final elle apporte des gages de sécurisation à la majorité de ses clients. L’enjeu est de susciter la confiance des utilisateurs. Et le meilleur moyen d’acquérir cette confiance est de faire la démonstration que son produit est d’équerre avec la réglementation en vigueur. 

Est-ce la fin d’un eldorado pour les entrepreneurs de la Fintech ?

Le secteur arrive à une forme de maturité et devient digne de confiance. Je suis convaincue qu’il y a encore de belles choses à faire. Mais il n’y aura de la place que pour les entreprises qui ont de vrais produits à vendre. Ca veut dire qu’il faut peut-être oublier un projet qui consiste à lancer la quatrième ou cinquième néo banque pour PME qui se différencie peu de celles déjà existantes. Il va falloir penser à des rapprochements voire des fusions de projets. La jeune économie doit travailler davantage avec les institutions et infrastructures existantes.


Pas de collision entre l’ancien et le nouveau monde

Le mouvement est déjà amorcé et on le voit depuis le rachat de Shine, néo-banque des indépendants et petites entreprises par la Société Générale. Je ne crois pas à une collision entre l’ancien et le nouveau monde. Au contraire, les partenariats doivent se mettre en place pour avancer tous ensemble et apporter des solutions nouvelles au service des clients. Les grandes banques françaises n’ont aucun souci à se faire si elles apprennent à travailler et à intégrer les innovations que portent les start-ups. C’est bien le sens du HUB612 qui a été créé pour accompagner la Caisse d’Epargne Rhône Alpes dans ses démarches d’innovation.

L’avènement du Web3 ne risque-t-il pas de bousculer encore davantage les pratiques bancaires des prochaines années ? 

On voit clairement la montée en charge du Web3, notamment concernant les cryptos. Cela va-t-il tenir dans le temps ? S’agit-il d’un effet marketing à paillettes ou cela deviendra-t-il le nouveau paradigme ? Le Web3 est encore très instable, mais on décèle des choses très intéressantes. L’usage n’est pas encore très fluide pour tout le monde, pourtant des choses peuvent être mises en place dans la blockchain pour donner confiance aux gens. A ce stade, c’est compliqué de savoir où ça va nous mener, c’est de l’ordre du pari. Il convient de tester encore le marché et de préciser ce qu’on peut faire avec ça. La réponse viendra par les usages qu’on ne discerne pas encore complètement aujourd’hui. 

Quelle est selon vous l’information marquante de ce sommet de Lisbonne? 

Le gadget technologique c’est fini. Avoir une belle tech ne suffit plus pour étayer un projet. Ce sont les usages qui priment désormais. Il faut réussir une belle alliance entre le produit et les usages pour s’en sortir. Ca paraît juste logique, mais il faut reconnaître qu’on sort d’une zone un peu folle. C’est une bonne nouvelle : on va remettre de la valeur au cœur des projets. 

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