L’IA : Une évolution pour les métiers, pas une révolution

Léo Marchandon
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Au fil de la dernière édition du salon Big Data & AI, à Paris en septembre, la question de la disparition d’emplois provoquée par l’émergence de l’intelligence artificielle a été abordée par plusieurs intervenants. Avec des perspectives plutôt rassurantes.

C’est une technologie majeure qui va profondément changer nos vies, une des clés pour l’avenir de la prospérité”, souligne Jean-Noël Barrot, ministre chargé du Numérique. Le positionnement est clair : l’IA, c’est l’avenir. C’est aussi un moyen de réduire la fracture numérique, avec les modèles de langage comme ChatGPT. “Avec ces IA, on n’a besoin de maîtriser qu’un seul outil, celui qu’on maîtrise le mieux : notre langage”. L’IA, oui, mais avec une certaine vision : “on a une vision de l’homme qui est une vision d’indépendance, une vision d’égalité des chances, et une vision de solidarité. On va accueillir cette nouvelle vague de technologie comme on a accueilli les précédentes : en les mettant au service de notre projet de société

L’occasion également de mettre en avant le potentiel de la France ; “parce que nous sommes reconnus dans le monde entier par la qualité de nos talents, qui sont recrutés depuis une décennie par les acteurs majeurs du monde entier. Parce que nous avons une énergie décarbonée. Parce que nous avons un patrimoine audiovisuel et textuel gigantesque.

Sur la question de l’emploi, un positionnement qui se veut rassurant : “il faut casser les discours alarmistes et ultra-pessimistes sur l’emploi”. Il voit d’un côté l’équipe “Malthus”, “ceux qui pensent que la technologie va remplacer les emplois”, et de l’autre l’équipe “Savy”, “ceux qui pensent que la tech va libérer des gains de productivité et permettre la création de nouveaux emplois”. Mais pour lui le match est déjà joué : “Si l’on regarde les deux derniers siècles, c’est toujours l’équipe “Savy” qui gagne”.

Démystifier la notion d’IA

Dans une réflexion sur le rôle de l’Europe dans la création de champions technologiques, Maya Noel, Directrice Générale de France Digitale, souligne l’importance de penser de manière collaborative. “On ne peut pas faire émerger des champions en Europe si on ne pense pas de manière européenne”. Elle met en évidence les atouts considérables de la France en termes de talent, notant que la France abrite “les meilleurs mathématiciens au monde” et compte pas moins de 600 startups spécialisées dans l’intelligence artificielle. Le défi majeur de l’IA : la peur qu’elle suscite et la nécessité de la démystifier, en rappelant que nous utilisons déjà de l’IA au quotidien depuis les années 2000 sans forcément nous en rendre compte. Après tout, le moteur de recherche Google Search est une IA, lui aussi.

Désormais Directeur scientifique chez Renault, Luc Julia est également le papa de Siri, l’assistant vocal d’Apple. Lui rejette cette notion d’intelligence : “l’intelligence artificielle n’a rien à voir avec l’intelligence. Je pense qu’on n’aurait pas du l’appeler comme ça. Mais ça fait 67 ans qu’on utilise le terme, donc trop tard, tant pis”. Il veut surtout faire entendre un point important : “les IA génératives génèrent. Elles ne créent rien, la créativité reste de notre côté”. Avouant ses faiblesses en tant que dessinateur, il donne un exemple : “j’utilise les IA génératives. C’est moi qui crée, elles qui génèrent. J’ai demandé de générer une vache verte sur la Tour Eiffel. Vous allez peut-être trouver ça idiot, mais c’est ce que je viens de créer. L’idée de la vache verte sur la Tour Eiffel, elle est de moi, pas de l’IA. Ces IA vont générer des choses qui vont exacerber votre créativité.

Peu de métiers en danger

Sur la question des disparitions d’emplois, Jean-Noël Barrot souligne une perspective importante : la réduction des coûts via l’IA n’est qu’une minorité parmi les nombreux cas d’utilisation. Autrement dit : les cas où l’IA peut simplement remplacer le travailleur sont extrêmement rares. Il met en lumière la prédominance écrasante de l’amélioration des services dans les cas d’usages, insistant sur son potentiel à être un outil au service des travailleurs plutôt qu’un remplaçant. “Ceux vraiment à risque sont une minorité, mais la justice sociale nous oblige à les protéger donc il faudra être vigilant.

Même son de cloche chez Luc Julia. “Oh là-là, mon boulot va disparaître, les IA vont me remplacer”, dit-il sur le ton de l’humour. “La réponse : c’est non”. Selon lui, la démocratisation de l’IA est une évolution, pas une révolution. Mais il reconnaît que les IA vont intégrer et transformer les métiers. Aux travailleurs alors de s’adapter. “La capacité à écrire de bon prompts fera partie des métiers”, avance-t-il.

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